Fynarmannasaga

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Cette saga commence alors que le roi Frodi régnait sur le Danemark, et elle se déroula au début de son règne, lorsqu’il assassina lâchement son frère Halfdan, fils de Halfdan, pour usurper le trône du Sjaelland.
Il y avait en l’île de Fyn des vassaux du défunt Halfdan qui regrettaient leur juste et bon souverain. Parmi eux se trouvait le jarl Hrolfr Knudssonr du clan Kjari à Rohald, lié par le sang des anciens à Odense.


CHAPITRE PREMIER

Frodi l’Usurpateur avait décidé de réunir ses sujets à Hleidra pour les fêtes de Jöl, afin d’y célébrer la cérémonie des hommages et s’assurer ainsi de la loyauté de ses vassaux devant le thing et devant les Dieux. Afin d’éviter d’avoir à prêter allégeance à un fratricide qui ne voulait que le pouvoir, et pour pouvoir continuer leur combat en mémoire d’Halfdan le Juste, les différents jarlar de Fyn s’organisèrent autrement. Hrolfr Knudssonr décida de profiter des fêtes de Jöl pour désigner son fils Sven comme son héritier, et il convia à la fête tous ceux qui souhaitaient encore se réjouir en ces temps difficiles pour le Danemark. Une fois les convives réunis, il les invita à prendre part à une grande partie de chasse. Parmi ceux qui accompagnaient Sven Hrolfssonr, un Thulr aventureux du nom de Lundvarr Thórbjarnasonr et un mercenaire aux origines mystérieuses appelé Ormr Reidharssonr. Ce sont eux qui m’apprirent leur histoire.


ORMSMAL
Après une longue chevauchée, dans la forêt, les espoirs de ramener la tête du grand cerf en trophée se raréfiaient. Sven Hrolfssonr et le thulr Lundvarr Thórbjarnasonr étaient aux aguets dans cette forêt. Mais ce fut Ormr Reidharssonr qui le premier comprit qu’il avaient perdu la trace du gibier. Au travers des frênes et des ifs, il remarqua également que quelque chose d’anormal : des volutes de fumée.
Trois hommes autour d’un feu campaient, et en dönsk tunga parlaient. Aussitôt repérés, il brandirent leurs épées et assaillirent les trois chasseurs, criant injures et menaces, promettant d’être sans pitié. Tandis que Sven se battait avec l’habileté due à ceux de son rang, Lundvarr peina à vaincre son adversaire et Ormr l’assista, après avoir majestueusement tranché la gorge de son premier adversaire d’un habile revers de sa lance ouvragée. Ormr transperça donc le second avec la même aisance que si sa cotte de cuir eût été une simple tunique de chanvre, et à ce moment même Sven achevait celui qu’il avait lui-même vaincu au cours de son duel. Malgré la brièveté du combat, partout régnait la sève rouge des guerriers, le fils du jarl lui-même était blessé; de l’aine à l’épaule il saignait.


LUNDVARSMAL
Bien que venant de survivre à son premier affrontement, le thulr devait avoir un Destin hors du commun, car il se remit aussitôt et ne perdit rien de son jugement. Il trouva en examinant le camp les traces d’un rituel malsain, une utilisation néfaste du savoir jadis enseigné aux Hommes par Odhinn de la maîtrise des Runes. Quelqu’un avait voulu porter une malédiction, visiblement contre la famille du jarl. En outre il trouva avec ses compagnons huit fontes de bronze, et seulement trois chevaux étaient encore là. Le malfaiteur s’était enfui.
Après avoir prodigué quelques premiers soins à Sven, le thulr s’aida de Ormr pour ramener l’héritier au village de son père.
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Il s’avéra que la blessure était superficielle et le soir même, les Danois célébrèrent dignement le Jólablót. Chaque Hirdmen renouvela solennellement son serment auprès de Hrolfr Knudssonr, et Sven Hrolfssonr fut désigné comme son digne héritier.
Lundvarr Thórbjarnasonr joua au Hnefatafl avec plusieurs marchands, et remporta plus d’une partie grâce à son esprit encore jeune, mais déjà tant aiguisé.
Ormr Reidharssonr se prit pour sa part dans diverses parties de dés et autres jeux de paris avec des marchands. Son caractère acerbe et quelques paroles justement venimeuses lui attirèrent les foudres d’un homme respectable, et les deux adversaires se levèrent et se jaugèrent au milieu de la maison longue. L’assemblée retint son souffle devant le potentiel duel, mais l’affrontement n’eut pas lieu. Un géant se dressa entre les deux hommes, et là où les yeux d’Ormr évoquaient ceux d’un serpent, le regard du géant reflétait celui d’un loup. L’Ulfhedhinn –car c’en était un– leur ordonna de s’arrêter, d’une profonde voix grave, calme mais terrifiante. Le jarl acquiesça, et les deux hommes hébétés repartirent ailleurs dans la maison longue. Ulfarr Jenssonr retourna pour sa part dans un coin d’ombre avec une monstrueuse corne d’hydromel. Il eût été un terrible adversaire pour Ormr Reidharssonr, mais le Destin des deux hommes n’était certainement pas de s’affronter.
La fête se poursuivit sans encombre, et cet incident n’entrava même pas l’enthousiasme initial des convives. Sven Hrolfssonr fit connaissance de divers importants marchands et seigneurs de toute la Scandia, venus à Rohald pour faire un escale dans leur périple.


ORMSMAL
Le lendemain, Ormr Reidharssonr, toujours autant attiré par un quelconque moyen de se procurer des richesses, chercha à revendre diverses armes qu’il avait acquises au cours de ses voyages et lors de l’affrontement de la veille. Il parvint finalement, non sans mal, à les revendre pour quelques onces à un rude marchand Scanien de passage. Mais il vit plus tard ce même marchand revendre le lot pour un prix bien préférable à un bóndi Danois. Se sentant offensé, Ormr injuria le Scanien et le défia en duel. Un hirdmen les conduisit tous deux jusqu’au cercle d’affrontement.
Le Scanien s’avéra grand et bien bâti pour un marchand, et il brandit une lourde hache à deux mains. Le duel devait s’arrêter au premier sang, mais il fut rapidement évident au vu des armes employées que ce ne serait pas le cas. Ormr fit virevolter sa lance en de multiples passes avec son habileté naturelle, mais la tension se lisait sur son visage : son adversaire était plus fort que lui. Le Scanien domina le duel dans un premier temps et força Ormr à reculer plus d’une fois. Un coup manqua même la tête de celui qui se disait fils de Loki d’une fraction de seconde. Mais Ormr eut le dernier mot : au moment propice il ramena brusquement sa lance en posture offensive et un instant plus tard, le marchand gisait dans son sang, percé de part en part et lâchant un dernier soupir. Quelques onces furent laissées pour ses funérailles.
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Dans la journée, en-dehors d’un concours de galanterie entre Ormr et Sven, bien infructueux pour le premier mais au cours duquel le second démontra tous ses talents, les héros n’accomplirent guère d’autre exploit. Seul le thulr Lundvarr Thórbjarnasonr mit à profit ses talents.


LUNDVARSMAL
Les événements de la veille avaient quand même beaucoup troublé le jarl, malgré sa joie apparente. Il avait chargé les héros de mener une enquête à leur manière, tandis que lui-même chercherait à s’informer davantage. Et le matin, le jarl se tordait de douleur dans son lit. Son soigneur comme Lundvarr convinrent qu’ils souffrait d’un mal de digestion, mais cette coïncidence demeurait troublante.
L’enquête dans le village ne mena d’abord qu’à quelques prétendus chamanes sames, mais un peu plus tard, Lundvarr apprit d’un jeune garçon d’écurie qu’un homme avait quitté le village à cheval dans la précipitation. C’était un inconnu. Sven et Ormr se lancèrent à sa poursuite. Lundvarr s’informa alors dans la maisonnée du jarl pour savoir si une autre personne souffrait, n’ayant trouvé aucune origine surnaturelle au mal du seigneur. Cette recherche le mena à Gudrid, femme enceinte du jeune frère de Sven, Herjolfr Hrolfssonr. En fouillant dans les affaires de la jeune femme, il trouva parmi les onces et les amulettes une aberration. Berkano inversée. Une malédiction qui aurait pu tuer l’enfant et même la femme si on l’avait laissée agir. Mais Lundvarr gratta la rune et la jeta au feu.
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Plus tard, Ormr et Sven revinrent avec un homme encapuchonné dans la maison longue du jarl, toujours faible mais debout en ces heures graves. Il gratifia son fils grâce à qui l’homme avait été pris, car Ormr n’était pas très habile à chevaucher. L’homme, un thulr qui avait visiblement souffert de son arrestation, gémit le nom de son maître en le pointant du doigt. Stigandi, troisième fils de Hrolfr voulut s’enfuir mais fut stoppé par Herjolfr.
Il fut avéré que le traître était un fidèle de Frodi qui avait cherché à affaiblir son frère pour prendre sa place. En s’accaparant ainsi un rôle plus important dans la famille de son père, il aurait ainsi pu pousser Hrolfr à s’allier finalement à Frodi.
Stigandi fut banni de Rohald par son père, et les villages voisins, ayant entendu l’histoire, méprisèrent tellement le traître que si dès lors Stigandi avait voulu ne serait-ce que traverser l’île de Fyn, il ne s’en serait probablement jamais sorti vivant. Il se réfugia en Hleidra.
Mais cet épisode avait surtout révélé l’importance de trois héros en devenir, dont le Destin s’avérait plus qu’exceptionnel.